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BATMAN ET ROBIN : MYTHE EN DANGER ?
 Un grand merci à Christophe CROMPIN pour sa relecture!

 Suite au beau succès de Batman Forever  (1995), Warner reconduit Joël Schumacher aux commandes de la nouvelle aventure cinématographique de Batman. Et cette fois Schumacher va assumer totalement sa vision du Batman et de son univers.

 Si dans Batman Forever il était encore possible de sentir l'ombre de Tim Burton et de l'approche sérieuse qu'il avait donné du mythe; ce n'est plus le cas pour Batman et Robin qui lorgne sans honte vers les années 60 et la série TV avec West et Ward, mais aussi vers les années 50 et le ton très fun des  comics Batman  d'alors.

 Pour son  nouveau Batman, Joël Schumacher veut un film optimiste. L'antithèse de Batman Returns. Et, après tout, pourquoi pas?  

 En plus de 60 ans le Batman est passé par toutes les interprétations possibles: du justicier sombre au voyageur interstellaire coloré. Pour survivre le mythe Batman a épousé l'atmosphère dominante des époques successives qu'il a traversé. En cela Batman et les comics en général sont un témoignage fort intéressant  sur les dominantes socio-culturelles d'une époque. Dans ce registre du témoignage socio-culturel, DC Comics a longtemps été en retrait, plus prudent -moins engagé?- que Marvel. Même le fan le plus acharné de DC doit admettre que dans les années 60 l'homme du renouveau des super-héros est Stan Lee, sans oublier Jack Kirby ou encore Steve Ditko. Ditko eut une double carrière: celle de dessinateur de comics et celle de dessinateur de bandes érotiques sous le pseudo de Stanton. C'est bien Stan Lee qui ramena les super-héros sur le devant de la scène culturelle populaire américaine. Tandis que Batman et Superman (les deux héros survivants des années 50) combattent les plus improbables des aliens dans un univers déconnecté du quotidien (d'une certaine réalité?); Stan Lee avec des héros comme les quatre Fantastiques ou Spider-Man va ramener les questions philosophico-existentielles dans l'univers des comics et, de fait, rattacher les comics à la quotidienneté des lecteurs. Les préoccupations philosophico-humanistes de Lee culmineront avec la série Silver Surfer à la fin des années 60. Ainsi, tandis que Peter Parker s'interroge sur ses propres responsabilités envers les autres; Bruce Wayne est redevenu un simple alibi pour Batman. Le Monde change et DC ne semble pas le voir, ou peut-être, comme nombre de citoyens, la firme veut encore croire à l' insouciance des Temps. DC n'a pas tout à fait tort, comme le montre le triomphe de la série TV Batman auprès des Kids, et probablement de leurs parents. Mais les teenagers regardent déjà vers d'autres horizons. Et ce qu'ils découvrent ce n'est pas un monde coloré plein de "Paf!", "Poum!"; ce qu'ils voient c'est la guerre. La guerre du Vietnam, mais aussi une autre guerre: celle pour l'égalité des droits civiques. Batman , celui qui au début de sa carrière protégeait le faible, semble bien loin. La série TV Batman marque un jalon important dans l'univers des comics en cela qu'elle est à la fois le triomphe d'une certaine idée des comics mais en est aussi le chant du cygne. Bientôt viendra un type nommé Neal Adams et avec lui le retour aux sources du mythe Batman. Premier retour mais pas le dernier. Ainsi, il semble bien que les mythes soient éternels à la seule condition  de se réinventer en prenant en considération l'époque et ses aspirations psycho-socio-culturelles. Le mythe s'il ne veut pas sombrer dans les limbes de la mémoire collective doit toujours prouver son actualité. Parce qu'il répond à un besoin, le mythe doit payer tribut à son époque. Autrement dit: le visage du mythe est intimement lié à celui de l'époque où il s'inscrit. Ce n'est pas le mythe qui façonne l'époque; c'est l'époque qui façonne le mythe. Croire qu'une image mythique peut s'imposer à une époque sans tenir compte de celle-ci est une erreur. 

 Et cette erreur Schumacher et la Warner vont la faire avec Batman et Robin.

 Batman est un mythe puissant mais reste d'autant plus un mythe, et en tant que tel dépendant d'un contexte socio-culturel. 

 En 1986 Frank Miller réinvente le mythe d'une manière extrêmement habile. Au lieu de "simplement" faire un retour aux sources avec tout ce que cela peut avoir de nostalgie sentant la bonne odeur d'antan, Miller projette Batman dans le futur. Mais là encore Miller se montre habile scénariste et ne sombre pas dans la facilité du voyage dans le temps. Non. Miller nous offre un Bruce Wayne vieillissant, usé, fatigué. Batman redevient en moins de 40 pages celui qu'il était près de cinquante ans plus tôt. Miller soumet Bruce Wayne au Temps mais pas le Batman. Cela est très explicite dans la première partie de Batman: the Dark Knight Returns. Bob Kane avait créé Batman avec la complicité très active de Bill Finger. Frank Miller prend le Batman et en fait le Dark Knight, chevalier d'une époque sombre.

 En 1996/97 c'est bien cette version du mythe qui est d'actualité. Les fans veulent le Dark Knight ou, au minimum, la version de Michael Keaton. S'il est vrai que Batman Forever fut un succès; il est possible de se demander ce que le succès du film doit à ses prédécesseurs?

 Visiblement la Warner ne se pose pas cette question. Joël Schumacher non plus. Quant à George Clooney il a maintes fois déclaré que sa seule référence en matière de Batman était la série TV.

 Tout le monde est donc d'accord pour faire de Batman et Robin une pure comédie d'action (très très légèrement teintée de drame) dans l'esprit de la vieille série TV mais avec les moyen d'un blockbuster! Comme le prouve l'arrivée d'Arnold Schwarzenegger sur le film. Clooney + Schwarzenegger = carton au box office assuré! Assuré?

 La première faiblesse du film est justement ses stars qui se plantent dans les grandes longueurs sur leur interprétation de Batman et Mr. Freeze. Clooney et Schwarzenegger n'ont pas compris que l'humour est une affaire sérieuse. Les grands comiques sont des acteurs qui prennent leurs personnages au sérieux et les jouent au premier degré, comme le firent Adam West et Burt Ward. West et Ward étaient drôles parce qu'ils jouaient au premier degré des situations absurdes. Le film souffre aussi d'autres faiblesses. Mais il possède ses atouts. Le premier est Uma Thurman, la bonne surprise du film. Le film possède aussi une dynamique narrative réelle sans temps morts, des décors impressionnants.

 Au final, si Batman et Robin n'est pas comme certains se plaisent à le répéter "le plus mauvais film de super-héros", il n'en demeure pas moins un film en décalage avec son époque. A ce titre l'échec du film n'est pas un échec artistique mais bien un échec de production, et donc de Warner.

 A noter: 1) Bob Kane fait une apparition lors du gala de charité. 2) Le scénario emprunte à deux numéros de Batman: Batman # 121 pour Mr. Freeze et Batman # 181 pour Poison Ivy et la querelle entre Batman et Robin. 3) sortie française: 9 juillet 1997.

Pascal Le Bris, octobre 2004.

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