Kitshiemon revenait de la ville située à plus de quatre jours de marche de la vallée où se déroulait son existence depuis maintenant plus de cinq années. Si, à l'aller, Kitshiemon trouva le voyage long, maintenant il était indifférent à la longueur du chemin. A présent il possédait un sabre! Oh! ce n'était pas une lame extraordinaire mais elle lui appartenait. Du moins c'est ainsi qu'il voyait les choses. Au milieu de la matinée du cinquième jour, il retrouva les paysages bien connus de la vallée. _ Maître! Ohoshi! Je suis de retour! Avec grand bonheur Kitshiemon vit son maître sortir du dôjô. _ Kitshiemon, te revoilà. _ Maître! Je suis heureux de vous revoir. _ Maintenant, tu as un sabre. _ Oui! Il est beau n'est-ce pas!? Kitshiemon exhiba son acquisition, ne cachant pas sa fierté de posséder enfin le sabre du samouraï. _ Voyez maître, la lame n'est pas piquée. J'ai bien fait attention. Je l'ai testée. Voyez! La lame est bien affûtée! Lorsque Kitshiemon eut fini de conter son voyage, sensei Takuenzo voulut en savoir un peu plus sur le sabre dont son disciple se montrait si fier. _ Pourquoi ce sabre est-il maintenant à ton côté? _ Un samouraï doit avoir un sabre! Bien sûr je ne suis pas encore samouraï mais... Avoir un sabre est tout de même important. _ Pourquoi ce sabre? _ Pourquoi ce sabre? C'est votre question? _ C'est bien ma question. _ Parce qu'il... Pourquoi ce sabre et pas un autre? Maintenant que j'y repense, c'est quand même étrange. _ Étrange? Comment cela? _ C'est que... Je ne suis pas sûr que vous compreniez. _ Raconte-moi. Nous verrons plus tard si je comprends ou non. _ Comme je vous l'ai dit il y avait beaucoup de sabres mais je n'avais que bien peu d'argent. _ Veux-tu dire par là que l'argent dont tu disposais te permettait l'achat de ce seul sabre? _ Cela je ne sais pas. _ Ah? _ Oui. J'ai vu ce sabre et j'ai su que c'était lui. _ C'était lui? Comment cela? _ Je ne suis pas certain d'y comprendre beaucoup. Sur la route menant à la ville, je songeais souvent au sabre et je m'étais fait une idée assez précise de celui dont je voulais faire l'acquisition. Mais une fois chez l'armurier j'ai vu ce sabre et, avant même d'en connaître le prix, j'ai su que c'était lui. C'était mon sabre. _ La chance était avec mon jeune disciple. Tu disposais de la somme nécessaire. Sans doute, si cela n'avait pas été le cas, tu aurais trouvé un autre sabre. Comme tu l'as dit, il y en avait beaucoup. _ Eh bien c'est cela l'étrange. Comme je vous l'ai dit: c'était ce sabre. c'est comme s'il m'attendait. Je vous l'ai dit, je n'y comprends pas grand chose moi-même. _ La rencontre avec le sabre est toujours inhabituelle.
* Pascal Le Bris, juillet 2006.
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